Nova et Vetera, vol. 92, 1 / 2017

Nova et Vetera, n. 92, 1 / 2017

 

Éditorial : Les 500 ans de la Réforme

+ Charles Morerod OP

À l’occasion de la célébration des 500 ans de la Réforme protestante, Mgr Charles Morerod exprime le souhait que le dialogue œcuménique entre les Églises et les communautés chrétiennes continue d’être inspiré et conduit par son but principal et véritable qu’est le rétablissement de la pleine unité des chrétiens.

 

Anne Perrier. In memoriam

Nova et Vetera

Nova et Vetera rend hommage à la poétesse suisse Anne Perrier qui fut liée à l’abbé Charles Journet par une longue et fidèle amitié spirituelle et artistique. Anne Perrier est décédée le 16 janvier dernier à Saxon en Valais.

 

Théologie philosophique et intelligence de la foi

Serge-Thomas Bonino OP

Cet article envisage les rapports qu’entretiennent la théologie philosophique, c’est-à-dire le discours métaphysique sur Dieu, et la théologie chrétienne ou intellectus fidei du mystère de Dieu, un et trine. Dans une perspective thomiste, la cohérence et l’autonomie de l’ordre naturel justifient la possibilité d’une théologie philosophique formellement distincte de la réflexion de l’intellectus fidei. Toutefois, cette théologie philosophique n’atteint sa pleine dimension qu’entretenant un contact vital avec la vie théologale et l’intellectus fidei. Faute de quoi, elle dérive vers une forme mortifère de déisme. Inversement, l’intellectus fidei du mystère du Dieu un et trine ne peut déployer toute son envergure qu’en assumant, sous sa lumière propre, les résultats d’une théologie philosophique autonome.

 

Définition de l’âme chez Aristote

Dominique Pignat

Il est assez habituel de retenir du Traité de l’âme d’Aristote la célèbre définition de l’âme donnée au début du deuxième livre : « l’âme est la substance au sens de forme d’un corps avant la vie en puissance ». Cette définition largement commentée et analysée n’est pourtant pas la plus importante dans l’esprit du Stagirite, ou plutôt elle ne trouve sa vraie justification que dans ce qui est présenté d’habitude comme une deuxième définition. Cette deuxième approche semble souvent peu exploitée, on pense qu’il s’agit d’une extension apportée par Aristote soucieux d’explorer plusieurs facettes de son problème ou d’apporter un supplément plus ou moins gratuit à un « fondamentum » donné dans sa première définition. Cet article aimerait insister sur la différence et la complémentarité indispensable des deux définitions et montrer que la deuxième définition de l’âme est la justification fondamentale et la preuve de la première ; elle permet surtout de donner la pleine mesure et de mettre en évidence l’originalité de l’idée aristotélicienne que l’âme est la forme d’un corps organisé.

 

Notes sur l’anthropologie de saint Thomas

François-Xavier Putallaz

L’anthropologie de saint Thomas est l’objet d’un regain d’intérêt, et c’est heureux. Les éditions Vrin publient une nouvelle traduction des questions 75-76 de la Prima pars de la Somme de théologie, sous le titre « L’âme et le corps ». La traduction de J.-B. Brenet est de qualité, même si on s’étonne de l’option consistant à isoler ces deux questions d’un plus vaste ensemble qui seul les expliquent.
Mais c’est la longue introduction (110 p.) sous la plume d’un éminent spécialiste, Bernardo Carlos Bazàn, qui fait l’objet de cette « note » : tout en présentant, et avec brio, les principaux axes de la conception de l’homme selon Thomas d’Aquin, il prétend prouver que, en raison de préjugés théologiques, le dominicain aurait introduit une grave « incohérence » au centre son anthropologie, qui la rend bancale et même « contradictoire ». L’article est une réfutation nuancée mais technique de cette thèse, qui montre comment Bazàn a introduit lui-même une difficulté. Seule la doctrine de l’être chez Thomas permet de comprendre que, loin de présenter une contradiction, son anthropologie se tient sur une ligne de crête qui en fait tout le génie, et sa vérité.

 

L’inévitable philosophie, selon G. K. Chesterton

+ Charles Morerod OP

Durant la première moitié du XXe siècle, Gilbert Keith Chesterton s’est attaché à démasquer les impasses de certaines convictions communes de la culture de son temps, dont entre autres l’admiration guère argumentée du progrès naturel des faits et des idées, assortie d’un rejet dédaigneux de vérités perçues comme désormais inacceptables et obsolètes. Passant en revue certaines convictions communes touchant notamment à la religion, l’auteur de cet article se propose de montrer comment Chesterton a su en manifester les présupposés inconscients, signes d’une attitude irréfléchie et acritique de la part de leurs tenants, alors que, selon l’écrivain anglais, toute réponse véritable aux questions de l’existence ne peut se passer d’un exercice critique de la raison capable de saisir et d’expliciter les raisons qui la fondent et en rendent compte.

 

Dernières nouvelles de l’homme

Fabrice Hadjadj

Les trois orientations postmodernes actuelles mettent l’homme en déroute : d’abord la techno-science finit par voir en l’homme le maillon faible : il faudrait alors le booster grâce aux nouvelles technologies et en faire en cyborg. Ensuite l’écologisme radical fait fantasmer jusqu’à idolâtrer la Nature. Enfin, le fondamentalisme religieux spiritualisant méprise le corps. Mais ces trois figures postmodernes se renforcent l’une l’autre, jusqu’à modifier la question anthropologique : au lieu de rendre l’homme plus humain, comme le pensait l’humanisme, on se demande aujourd’hui pourquoi défendre l’humain. Soulignant l’ambivalence de l’appel à un nouvel humanisme, l’article pose donc la question de ce qui est véritablement nouveau : l’innovation qui rend les objets fabriqués aussitôt obsolètes, ou la naissance d’un enfant, véritable « homme nouveau » ?

 


 

Notes et Lectures

Le « magistère écologique » de l’Église

Gilles Emery OP

L’enseignement récent des papes sur l’écologie forme un véritable corpus dont les principaux documents ont été réunis dans le livre : Les papes et l’écologie, 50 ans – 50 textes de Gaudium et spes à Laudato si’ (1965-2015), Présentation, choix de textes et index par Thomas Michelet o.p., Éditions Artège, Paris–Perpignan, 2016. Cette note de lecture présente cet ouvrage, met en relief le développement de l’enseignement pontifical, souligne certains points centraux de l’encyclique Laudato si’, et offre une discussion critique de la thèse de Lynn T. White attribuant l’origine de la crise écologique à l’anthropocentrisme chrétien et à la théologie naturelle de la tradition médiévale latine.

 

Bibliographie

Étienne Fouilloux, Michel Fourcade, Religion, Culture et Histoire. Lignes de vie et de recherche - Sébastien Morlet, Christianisme et philosophie. Les premières confrontations (Ier-VIe siècle) - Farîd od-dîn ‘Attâr, Le cantique des oiseaux, Illustré par la peinture en Islam d’Orient - Dominique Millet-Gérard, Paul Claudel et les Pères de l’Église - Miklos Vetö, Pierre de Bérulle, Les Thèmes majeurs de sa pensée - Laurence Plazenet (éd.), La mémoire à Port-Royal, De la célébration eucharistique au témoignage - Roland Recht, Revoir le Moyen Âge, La pensée gothique et son héritage - André Wenin, Abraham ou l’apprentissage du dépouillement.